For Those That Wish To Exist : un nouveau chapitre de la carrière d’Architects

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For Those That Wish To Exist est sans doute le projet le plus audacieux de la carrière d’Architects. Avec lui, le quintette clôture un chapitre long de trois efforts : Lost Forever // Lost Together, All Our Gods Have Abandoned Us et Holy Hell. Ce dernier est un hommage à Tom Searle, guitariste fondateur du groupe aux côtés de son frère batteur, Dan. Lui a récupéré les quelques fragments composés par son frère pour s’atteler à la production de ce qui est l’album d’Architects le plus chargé d’émotions à ce jour.

Il réitère l’expérience ici, accompagné par le guitariste Josh Middleton. Abandonnée, la culpabilité de laisser l’histoire de Tom dans le passé. Avec For Those That Wish To Exist, Architects prend confiance et suit son intégrité. La voie de la facilité aurait été de pondre un énième recueil de metalcore. Néanmoins, ces 15 titres sont un concentré de l’essence du groupe, habitée par des émotions fortes, habillée par une nouvelle palette de sons. En témoignent les quelques nouveautés entendues lors de leur show au Royal Albert Hall en novembre.

Comme tout changement survenu dans l’identité musicale d’un artiste, cet album divisera. Mais la patte d’Architects telle qu’on la connaît ne disparaît pas totalement. On retrouve ça et là des passages qui nous rappellent la période Daybreaker et les sorties les plus récentes. L’empreinte de Dan Searle et sa confiance acquise marquent quelques pépites qui auraient pu figurer sur les précédents opus.

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For Those That Wish To Exist pousse Architects à dévier d’une direction prévisible… mais pour aller où ?

For Those That Wish To Exist traite de l’état actuel de tout et de l’indifférence intégrée dans les mentalités face à un futur incertain. Le groupe dénonce l’inaptitude collective à changer nos habitudes pour enrayer la destruction de la planète. Il ne s’agit plus pour Architects, ni même pour les groupes en général, de pointer les problèmes sociaux du doigt. Poser les bonnes questions suffit à faire s’éveiller les consciences.

Musicalement, l’innovation dans l’utilisation des choeurs, des cordes et des claviers m’a frappée. Evidemment, les riffs et les breakdowns sont toujours présents, comme une base solidement attachée au groupe.

L’expérimentation se distingue par des titres qui flirtent avec la pop parfois et des tracks aux influences cinématiques, apocalyptiques. Le groupe perd en agressivité mais gagne en impact. On est loin du post-hardcore mais les musiciens ont évolué avec leur son et l’ont fait mûrir.

En tant que fan, je ne peux pas dire ‘amen’ à tout et encenser cet album auquel je trouve quelques défauts. Le premier : la longueur. Je pense que l’on aurait facilement pu se passer de Flight Without Feathers, Demi God et Meteor, auxquels je n’accroche pas. Selon moi, ces morceaux ne trouvent pas leur place dans la tracklist.

Le second : l’impression de désordre ressentie à la fin. Après huit projets à parfaire une formule metalcore, Architects propose du neuf avec For Those That Wish To Exist. J’en suis la première heureuse mais la raison pour laquelle il divisera est son manque d’homogénéité.

« You wanna make your hell a reality
Black lungs for the young if they dare to breathe
Sure sounds like heaven to me »

Animals a marqué un premier pas vers l’inévitable évolution du groupe et l’autre pied est resté ancré dans le passé. Parmi les singles, je pense que celui-ci a été le plus logique et sensé. Je l’ai tout de suite aimé : sa force délivrée dans le mix, la production, propre, et le scream… La surprise fut cette grande partie de chant clair à laquelle le groupe ne nous avait pas habitué sur un morceau de cette envergure.

Puis Black Lungs et le sublime Dead Butterflies ont suivi. Le premier comporte un refrain efficace qui contraste avec la dureté des couplets. Armé d’une technique parfaite, Sam Carter délivre ici une performance incroyable ! Les paroles pleines de métaphores persistent et signent sur cette urgence à réformer notre conscience écologique.

« Goodbye, all the doves have flown away »

J’ai eu le bonheur de découvrir Dead Butterflies en live, lors du concert streaming au Royal Albert Hall. La chanson ne perd rien de sa superbe en version studio et fait partie de mes préférées de l’oeuvre. La spiritualité des paroles, la mélodie d’intro aux claviers reprise ensuite dans le refrain. La démonstration vocale de Sam est exceptionnelle, entre scream sur le pont et chant clair sur le reste. Ainsi, j’en suis sûre, Dead Butterflies fera partie des incontournables d’Architects.

Au contraire, j’avoue ne pas trouver mon bonheur chez Meteor. Effectivement, je lui trouve une banalité qui gâche le potentiel pourtant énorme du morceau. J’aurais préféré un Giving Blood ou un featuring en guise de dernier single promo. En plus, il parle de ‘quarantine’ et j’en ai marre de ça… Son seul point positif est la fin du pont, juste avant qu’il ne reparte sur le dernier refrain. Les cordes et les choeurs sont magnifiques mais ne suffisent pas à rattraper ma déception.

Délicat, vulnérable et mélodique, le disque promet une forte intensité dès l’ouverture, Do You Dream Of Armageddon?. Un air de bienvenue dans un monde cinématique et une expérience spectaculaire. La base instrumentale est agrémentée d’une ambiance dark electro qui rappelle un mood apocalyptique, thème des paroles. De même, An Ordinary Extinction consiste en un titre électronique pur et dur. Se heurtent à ce son le riff de Josh et un scream impeccables. Les deux parties illustrent les facettes du style auquel s’essaye Architects.

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« So sing us a sad song, sing us to sleep »

Le groupe ne renie pas ses racines. Celles-ci se développent et (re)prennent vie grâce à Discourse Is Dead. Tous les éléments qui ont sublimé la carrière d’Architects sont là : un scream maîtrisé, une voix qui me donne des frissons et un refrain aux sonorités mystiques, symphoniques. Sans oublier, bien sûr, les riffs sans lesquels la musique perdrait de son âme. Cette chanson fait partie de celles qui ont pris vie le soir du concert au Royal Albert Hall. Oui, le groupe avait parfaitement bien constitué sa setlist !

Sur l’album, les pistes de An Ordinary Extinction à Libertine forment un très bon enchaînement. Quoique… Comme je le disais plus haut, Flight Without Feathers ne trouve pas sa place dans la tracklist. A force d’écoutes en boucle, ce morceau est le seul que je passe. Je ne comprends pas la démarche de l’avoir placé entre deux petits bombes qui apportent toutes ses couleurs à l’ensemble.

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« Long live the king that’s not listening »

Impermanence, en feat. avec Winston McCall (Parkway Drive) frappe fort et juste. J’avais vraiment hâte d’écouter cette collaboration et je ne suis pas déçue ! Cette mélodie qui fait monter la pression dès les premières notes est remplie de promesses. Et ne faillit pas. En réponse à Sam, Winston montre son aisance dans ses screams, plus enracinés que jamais dans le mood du morceau.

Mike Kerr (Royal Blood) est invité sur Little Wonder qui fait repartir le rythme de l’album après Flight Without Feathers. C’est probablement le morceau le plus pop de FTTWTE, prouvé par les arrangements sur la voix de Mike, la ligne instrumentale, les choeurs et les effets. Les paroles sont plus légères aussi : « I wanna sing you a different song, one that’s easier to follow ». Aussi surprenant que cela puisse être, Little Wonder est énergique et fonctionne très bien dans la logique de la tracklist.

Il en va de même pour la participation de Simon Neil (Biffy Clyro), hurlant, comme possédé, sur Goliath. En effet, ce titre est comme un sas de décompression. Le refrain est aérien dans son instru et est chanté d’une voix claire, puis les couplets sont screamés d’une voix rigoureuse. Puis Simon et Sam donnent et redonnent une leçon de scream à qui veut l’entendre. Le savoir-faire et la pertinence de ce duo fait de Goliath l’un des meilleurs de l’album, sublimé par les cordes qui le clôturent.

« We’re just a bunch of fucking animals »

Comme tous les précédents projets d’Architects, je garde déjà bien en tête certains passages de For Those That Wish To Exist. Et ils le resteront sans doute un bon bout de temps… Que ce soit l’excellent Animals, le refrain de Giving Blood, la magnifique mélodie de Dead Butterflies ou, plus forte, celle d’Impermanence… Je prends, je garde toujours un bout de ce groupe avec moi.

Je disais ne pas avoir apprécié Demi God et Meteor, qui sont respectivement les treizième et quatorzième pistes. Mais je ne peux terminer cette chronique sans écrire sur la dernière performance qu’est Dying Is Absolutely Safe.

Il y a longtemps que je loue les mérites d’Architects. Mais cette chanson est réellement parmi les plus belles qu’ils aient jamais composées. Tout est sensationnel : la voix de Sam, toujours au top dans sa technique, que ce soit au chant clair ou scream. La mélodie à la guitare acoustique, ce qui est assez inattendu… quoique pas tellement depuis la version acoustique de A Wasted Hymn. On l’imagine facilement et avec plaisir dans un set débranché. Les choeurs qui rejoignent Sam sur les derniers couplets anticipent une fin d’anthologie. Ce final avec l’ensemble instrumental et vocal produit par Dan Searle vient me donner raison.

Comme une lueur dans l’obscurité après quelques moments peu remarquables, Dying Is Absolutely Safe révèle toute sa beauté. Le dernier point d’orgue et touche finale d’une oeuvre symbolisant un renouveau.

Conclusion

For Those That Wish To Exist est l’album marquant le nouveau départ dont Architects avait cruellement besoin. Malgré le sentiment de chaos qui règne à la fin de chaque écoute, je pense que pour eux, aujourd’hui, « the sky is the limit ». Architects avait besoin de faire ce disque et d’aller au bout de ses idées, bonnes ou mauvaises. Le principal était de mettre derrière eux un chapitre difficile et de repartir sur les bases les plus saines possibles.

Enfin, l’important est que le groupe se soit relevé après tant d’épreuves et qu’ils aient trouvé la force de continuer à honorer la mémoire et l’héritage de Tom Searle. Le reste, c’est le public qui le déterminera…

Coups de coeur : Discourse Is Dead, Dead Butterflies, Impermanence, Animals, Dying Is Absolutely Safe

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