Alien Hand Syndrome. Syndrome de la main étrangère, de la main anarchique, faisant souffrir les malades de mouvements incontrôlables de la main.
Alien Hand Syndrome, c’est aussi un musicien autrichien avec un univers bien à lui. Influencé par Radiohead, Placebo ou encore les Beatles, l’artiste, de son vrai nom Clemens Engert, ne fait pas que chanter ses idées noires, il les jette, les utilise pour soulager un esprit troublé. En quelques chiffres, Alien Hand Syndrome, c’est deux albums, sept ans de carrière et plus de 4000 fans sur sa page Facebook.
Interview avec l’une de mes plus belles récentes découvertes…
Selon tes influences, as-tu une manière spéciale d’écrire, de composer et d’enregistrer tes chansons ?
Non, pas vraiment. Au cours de ma carrière, j’ai utilisé beaucoup de manières différentes. Lorsque j’ai fondé Alien Hand Syndrome en 2007, j’avais des idées inachevées en tête, puis j’ai sorti mes deux premiers EPs et ces concepts sont devenus plus concrets au fil des années.
Avant que nous commencions l’enregistrement du premier album, The Sincere and the Cryptic, ces idées étaient encrées en moi et il m’a été très difficile de travailler avec le producteur parce que je voulais que tout ressorte exactement comme cela sonnait dans mon esprit.
Avec le second disque, ça a été plus simple car j’avais plus d’expérience et les chansons étaient nouvelles. J’étais plus détendu. Quant à la composition, je suis aussi passé par beaucoup de procédés. Parfois, j’écris des chansons à la guitare acoustique, au piano ou je commence un projet sur l’ordinateur et m’amuse avec les synthés.
Quand on a été en répétitions, on a pu faire émerger quelques bonnes idées pour des chansons pendant nos jam sessions.
A quoi ressemble une journée type de Alien Hand Syndrome ?
Et bien, j’aurais aimé en avoir une ! Chaque jour est complètement différent. Il m’arrive de ne pas sortir du lit car je n’ai aucune motivation.
Parfois, je ne sais me décider sur quoi faire en premier car trop de choses me trottent dans la tête et je veux tout faire à la fois. Je suppose que la vie est comme ça pour les gens comme moi. On m’a récemment diagnostiqué un trouble bipolaire type II, d’ailleurs. C’est un peu mieux que le trouble bipolaire type I, m’ont-ils dit 😉
Tu sembles t’intéresser à toutes les formes d’art, pourrais-tu m’en dire plus (ce que tu préfères, ce que tu n’aimes pas) ?
Je m’intéresse à beaucoup de formes d’art. J’admire les écrivains existentialistes français comme Albert Camus, Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, surtout L’Etranger d’Albert Camus et La Nausée de Sartre.
Côté musique, j’admire des groupes tels que Nirvana, Radiohead, The Beatles, David Bowie, etc. J’aime aussi la musique plus sombre, mais aussi le classique – en particulier Bach – qui m’influencent.
J’apprécie certains peintres, surtout Francis Bacon et Hieronymus Bosch. D’ailleurs, j’ai réalisé la vidéo qui illustre Daniel and the Lions avec certaines des peintures de Bosch.
Ce que je n’aime pas, ou peut-être ne comprends pas, c’est le Pop Art – Andy Warhol, Roy Liechtenstein -. Je ne ressens aucune connexion émotionnelle face à cela, si tant est qu’il y en ait une.
Ton univers musical semble sombre, mais comment vois-tu la vie, personnellement ?
Et bien, c’est bizarre ! J’explique souvent aux gens que je me dois d’être dans un bon état d’esprit pour écrire. Tu sais, quand tu es en pleine dépression, tu ne peux rien faire et tu ne penses même pas à écrire une chanson – c’est juste impossible -.
D’autre part, d’un point de vue personnel, créer ce genre de musique me permet d’y apposer toute mon anxiété et tout mon désespoir. C’est comme un processus d’auto-guérison. Beaucoup de gens m’ayant écouté et rencontré sont en fait surpris de me voir « normal » et positif. J’ai probablement plus de moments « up and down » que les autres mais ça ne veut pas dire que je suis pessimiste. L’humour a aussi un rôle important dans ma vie.
Si tu n’avais pas fait de la musique, qu’aurais-tu fait d’autre ?
Toute ma famille est dans le domaine sportif, notamment le tennis et le football. J’ai été un bon joueur de football à 14 ans, mais tu sais, à cet âge, soit tu décides de t’y mettre sérieusement et de te rendre à l’entraînement 4 à 5 jours par semaine, soit tu te mets à sortir avec tes potes, boire, fumer et t’amuser. J’ai choisi la seconde option.
Je suis content de l’avoir fait, mais parfois, je me demande comment les choses se seraient déroulées si j’avais été joueur de football. C’est sympa de penser à ça de temps à autre.
As-tu quelques anecdotes de ta vie en studio ou en tournée ?
Je ne sais pas si je devrais le raconter mais il y a eu un moment, durant l’enregistrement du dernier album, pendant lequel je me suis assis avec deux autres musiciens (je ne mentionnerai personne 😉 ).
Nous avons parlé de tout et de rien, de femmes que nous avions rencontré, et à un moment, nous avons réalisé que tous les trois nous étions fait la même fille (chacun lors d’une occasion différente). C’était bizarre parce que l’on avait pas le même cercle d’amis, mais on était comme liés par cette fille.
Qu’est-ce qui t’a poussé à te lancer dans la musique ? As-tu eu un déclic qui t’a fait ressentir que tu ne ferais rien d’autre que cela ?
Au départ, la musique n’était rien d’autre qu’un moyen de me dissocier de mes parents et de mon frère. Comme je l’ai dit, ma famille n’était vraiment à fond que dans le sport et personne ne s’intéressait à la musique. Je voulais juste être différent.
Au début, j’étais principalement un fan d’autres groupes, puis j’ai commencé à créer ma propre musique et c’est assez tôt que j’ai su que c’était ce que je voulais faire de ma vie.
Y a-t-il des gens, des événements ou des choses qui t’inspirent plus que d’autres ?
Environ 99 % de mon inspiration vient de mon moi intérieur. J’écris rarement sur d’autres choses que ce qu’il se passe dans mon esprit. Beaucoup appelleraient ça de l’égocentrisme, mais c’est juste ma manière de faire. Alien Hand Syndrome est relatif aux émotions, rien d’autre.
Que penses-tu de l’industrie musicale d’aujourd’hui ?
C’est une bonne question :). Aujourd’hui, je ne comprends pas pourquoi des groupes – surtout ceux bien établis – se plaignent de ne pas être assez bien payés pour leur musique. Je veux dire, on a passé ces cinquante dernières années à condamner l’industrie musicale, à parler de l’avarice et à quel point les majors peuvent être mauvais, comment ils détruisent le vrai art, etc.
Maintenant, nous avons la chance de pouvoir présenter directement notre musique aux fans, à travers le monde, sans l’aide d’un label – tous nos rêves ‘punk’ sont devenus réalité et tout le monde se plaint encore. Je ne comprends vraiment pas !
Si tu avais le pouvoir de changer quelque chose, le ferais-tu ?
Glace gratuite pour tout le monde ! Il devrait y avoir des magasins dans le monde entier qui offriraient des Ben & Jerry’s en grande quantité, gratuitement, et 24h/24h.
Et bien sûr, je mettrais fin au racisme, au sexisme, à l’homophobie, mais j’ai bien peur que cela soit moins réaliste que mon premier vœu.
Y a-t-il un artiste et/ou un album qui ait changé ta vie ?
Deux albums ont eu un énorme impact sur ma vie. In Utero de Nirvana, parce que j’avais 13 ans et à ce moment-là, ça a sonné comme quelque chose d’émotionnel, plus que ce que j’avais pu entendre auparavant.
Le second serait OK Computer de Radiohead car je n’ai jamais entendu de si belles mélodies et de si bons arrangements de toute ma vie. Surtout des chansons comme Paranoid Android ou Exit Music qui me font encore avoir des frissons aujourd’hui malgré le fait que je les ai tant écoutées.
As-tu déjà pleuré et/ou ressenti quelque chose de fort pendant un concert ? Tes chansons sont plutôt personnelles, as-tu déjà eu peur de les jouer en live ?
Non, je n’ai encore jamais pleuré sur scène, mais parfois, quand je joue une chanson, je me souviens de l’état d’esprit dans lequel je me trouvais lorsque je l’ai écrite.
Broomstick Jesus serait un bon exemple. J’étais totalement désespéré, en larmes, quand j’ai écrit les paroles, et à chaque fois que je les chante, c’est comme si les émotions revenaient à moi. C’est encore parfois difficile de la jouer.
Quel(s) artiste(s) voudrais-tu voir en concert ?
Je sais pas, je pense avoir déjà assisté à tous les concerts d’artistes que je voulais voir. Malheureusement, je n’aurai jamais la chance de voir Nirvana ou les Beatles, mais au moins, j’ai vu Paul McCartney jouer à Vienne l’été dernier. C’était génial !
Je n’ai pas encore été à un concert de David Bowie, que j’aimerais vraiment voir sur scène. Je préfère ses morceaux des années 70 à tout ce qu’il a pu faire d’autre, mais je ne sais pas s’il joue encore des chansons de cette période.
Si tu devais collaborer avec un artiste, qui choisirais-tu ?
Probablement Björk. Qui ne voudrait pas collaborer avec elle ?
J’adorerais faire une chanson avec Soap and Skin (musicienne, chanteuse et actrice autrichienne), une chanteuse de qui je me sens proche de par une forte connexion avec sa musique. Parfois, je rêve que Tim Burton m’appelle pour me demander s’il peut utiliser ma musique pour l’un de ses films. Ce serait une collaboration fantastique !
What’s next ?
Je travaille actuellement sur deux projets.
Le premier est une série de reprises que je diffuserai sur Soundcloud et Youtube en deuxième partie de cette année.
Le second projet est un EP digital, qui pourrait être publié début 2015. Il contiendra deux rééditions d’anciennes chansons (Leave Now and Never Come Back et The Evil and the Lovelorn), qui, finalement, sortiront sous leur forme originelle + deux, trois nouvelles chansons.
Je pense sortir deux video clips aussi. Et j’ai en tête quelques projets pour le prochain album. Je serai vraiment occupé en cette fin d’année !