Interview : Megan Targett (VEXED)
En juin dernier, VEXED nous a offert Negative Energy, deuxième album aussi intense et personnel que pertinent et oppressant. Formé en 2019, le trio britannique composé de Megan Targett (chant), Jay Bacon (guitare) et Willem Mason-Geraghty (batterie) attire immédiatement l’attention des plus grands grâce aux singles « Elite », en feat avec CJ McMahon (Thy Art Is Murder), puis « Dominate ». Sur Culling Culture, son premier album sorti en 2021, VEXED maintient sa direction musicale et signe ses dix chansons d’une patte lourde. Le groupe est honnête et évoque des problèmes sociétaux tels que la santé mentale et la justice sociale. Succès commercial validé par les fans et les critiques, Culling Culture est le point de départ sensationnel d’une carrière prometteuse !
Je ne connaissais VEXED que de nom et n’ai pas suivi ses débuts, mais avoir travaillé sur la campagne de son deuxième album a éveillé ma curiosité. Que vous le vouliez ou non, Negative Energy vous attrape et vous enveloppe de toute sa puissance. L’énergie négative du groupe est canalisée dans cette musique aussi enivrante que l’obscurité dans laquelle on se trouve. Pour en savoir plus sur Negative Energy, son processus de création et l’état d’esprit des musiciens, voici quelques explications données par Megan Targett.
« Avec Culling Culture, nous avions l’impression de ne pas avoir trouvé notre patte.. »
Premièrement, merci de prendre le temps de répondre à mes questions !
Avec plaisir ! Merci de m’avoir contactée !
Avec Negative Energy, VEXED sort clairement de sa zone de confort et de ce qui a fait Culling Culture, sorti il y a deux ans. Qu’est-ce qui vous a amené à prendre cette décision de vous éloigner de ce son ?
En toute franchise, nous n’étions pas totalement satisfaits de notre premier album. Bien que nous en soyons fiers et qu’il nous ait apporté plein de choses positives, du point de vue de l’écriture, nous avions l’impression de ne pas avoir trouvé notre patte. Nous avons fondé VEXED en gardant en tête d’écrire la musique que nous aimons, car nos anciens groupes nous limitaient là-dessus. Mais je pense que nous avons gardé ces habitudes inconsciemment, et il nous a fallu un moment avant de nous en débarrasser. Notre deuxième album Negative Energy est une vraie représentation de nous, en tant que musiciens, et de la vision que nous avons de notre musique. Je pense qu’avoir pris du temps pour moi, couplé à mes années d’expériences traumatisantes nous a permis de mûrir, mais également de gagner en assurance et en confiance.
En écoutant Negative Energy, j’en ai décelé deux points principaux : j’ai ressenti une atmosphère très pesante, puis un sentiment de laisser-aller, grâce et / ou à cause de ce son très lourd ! Était-ce le résultat que vous souhaitiez ?
Nous n’avons jamais vraiment pensé à ce que nous voulions en général, c’était plus une question de ne rien retenir, de ne faire aucune concession. Musicalement, textuellement, vocalement, j’ai simplement tenu à accomplir ce que j’ai toujours voulu. Ce qui je suppose correspond aux points auxquels tu as pensé ! Le côté oppressif étant caractérisé par les sujets inconfortables et pénibles dont j’avais besoin de parler tout en ayant trop peur de le faire. Puis la liberté de m’exprimer enfin et d’être capable de faire face à toutes ces choses aussi ouvertement. Cela a été très angoissant, mais aussi très thérapeutique une fois fait.
« Negative Energy a été très difficile à écrire. »
Le titre ‘Negative Energy’ peut exprimer beaucoup de choses et viser la toxicité qui émane des réseaux sociaux et même autour de nous par les gens qui se jugent constamment… Quelle était l’idée précise derrière ce titre ?
Negative Energy vient de l’idée que nous n’avions plus rien à apporter à cet album et au process d’écriture. Nous écrivions des paroles aux messages positifs et motivants, faisions comme si tout allait bien alors que vraiment, en réalité, nous n’étions pas en forme. Nous étions épuisés, dans tous les sens du terme. La seule énergie qu’il nous restait était négative, donc nous l’avons canalisée dans l’album.
Qu’est-ce qui vous inspire l’écriture de votre musique ?
Enfant, j’ai été forcée de grandir très vite, dès mon plus jeune âge, et faire bonne figure, ne jamais m’autoriser à paraître faible était mon mécanisme de défense. Je pensais devoir être courageuse et stoïque tout le temps, donc à l’âge adulte, j’ai agi de la même manière. Cependant, cela a son impact sur le mental au bout d’un certain temps donc je prends l’écriture comme une façon de gérer mes émotions, une méthode thérapeutique. Quand je ressens que j’ai enfoui quelque chose trop longtemps mais que je me sens prête à le libérer, j’écris une chanson.
Quelles étaient les émotions qui te venaient le plus pendant l’écriture ?
Oh mon Dieu, il y en a eu tellement ! L’album est basé autour du processus du deuil, de ce que nous avons traversé pendant une certaine période, les garçons et moi, période déjà horrible après avoir perdu un proche. Il y avait aussi beaucoup de colère issue de la corruption et du mauvais traitement que nous avons reçu de la part des gens de l’industrie musicale. Il y avait une impuissance totale ambiante et ce désespoir d’avoir perdu un parent. J’ai également ressenti des peurs paralysantes d’attaques de panique et le syndrome du ‘PTSD’ d’avoir eu à traverser tous ces événements atroces. Negative Energy a été très difficile à écrire.
« Nous aimerions beaucoup travailler avec des artistes hors du Metal »
Quels ont été vos projets les plus complexes ?
Probablement Negative Energy. Nous étions dans un si mauvais mood, mentalement et émotionnellement, que je n’étais pas sûre d’être capable d’écrire un nouvel album. Ce n’est pas que nous ne voulions pas, c’est que la motivation n’était plus là. Nous avions juste besoin de temps pour faire notre deuil et guérir, mais la vie en a malheureusement décidé autrement.
Que pensez-vous de l’industrie musicale actuelle ?
L’industrie musicale est pourrie en son coeur. Cela paraît dramatique, mais plus on reste dans cette sphère, plus on rencontre des gens, plus cela apparaît comme évident. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas des personnes merveilleuses et des opportunités auxquelles se raccrocher, mais la plupart du temps, nous avons vent de ce qui arrive à des gens qui ne le méritent pas, et c’est difficile de ne pas se sentir découragés. Il est presque impossible d’en vivre, les plateformes de streaming nous volent à la lumière du jour, et les relations haut placées sont plus estimées que le travail et le talent. Néanmoins, les gens honnêtes et talentueux avec qui tu travailles, et les fans en valent la peine. Il y a encore énormément de travail quant aux conditions de vie des musiciens, mais nous avons appris à restreindre notre cercle, à continuer à travailler dur, et un jour ou l’autre les gens les écouteront.
Avec quels artistes aimeriez-vous travailler ?
Nous voulons vraiment travailler avec Emmure et Frankie Palmeri. Look At Yourself est l’un de nos albums préférés, et Frankie m’inspire beaucoup en tant que chanteuse. Nous aimerions beaucoup travailler avec des artistes hors du Metal aussi. Personnellement, j’adorerais écrire un titre avec Ashnikko. J’adore sa musique, son esthétique, et mélanger nos styles différents pourrait donner quelque chose de vraiment cool.
‘What’s next?’
Nous allons bientôt annoncer des dates de concert, et sortir d’autres clips, et du contenu intéressant pour nos fans ! Nous voulons recommencer à écrire, et continuer à travailler aussi dur que possible, dans l’espoir un jour de vivre pleinement de la musique.
Le mot de la fin
Je voulais juste ajouter quelque chose concernant l’essai que tu as écrit pour Kerrang! l’année dernière au sujet de ce que c’est que d’être une femme dans un groupe, et plus largement dans l’industrie musicale, et à quel point il est fatiguant de sans arrêt se comparer aux autres. En tant que personne qui ai toujours voulu travailler dans ce milieu, merci pour tes mots là-dessus !
Oh mon Dieu, mais de rien ! Merci d’avoir partagé cela avec mois ! Je suis désolée que tu aies clairement dû traverser des difficultés similaires aux miennes, mais le fait que tu aies persévéré sans laisser cela t’arrêter est génial et énorme. Continue !!
→ Cliquez ici pour lire l’essai de Megan sur Kerrang.com
Merci à Megan Targett d’avoir pris de son temps pour répondre à mes questions et à l’équipe de Napalm Records.
FFO : Spiritbox, As Everything Unfolds, Dying Wish